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« On n'a rien dit pendant près de 30 ans »

Parti à l'époque avec la ferme intention de revenir pour témoigner, Jean-Pierre Crépin voudrait voir les ultimes secrets de la guerre d'Algérie enfin dévoilés.

« C'est ma vision, c'est mon expérience, d'autres ont vécu des choses différentes ». Jean-Pierre Crépin n'a pas encore 21 ans quand il arrive en Algérie, en septembre 1958, pour y rester jusqu'en décembre 1961. Plus de cinquante ans après, les souvenirs de ces 27 mois éprouvants sont intacts.

Cette guerre « sale », « comme toutes les guerres », il l'a revit régulièrement, surtout depuis que les langues se délient. « Pendant près de 30 ans, on n'a pas abordé le sujet. » Parmi les 2 millions d'appelés, « beaucoup n'ont pas voulu en parler à leur retour, tandis que les officiels continuaient de présenter ça comme de la pacification ».

Le cinquantenaire de la fin du conflit doit être, selon lui, « l'occasion de refaire surgir des choses, y compris du côté algérien, pour voir toutes les faces d'une guerre complexe ». L'affaire Aussaresses, les événements du 17 octobre 1961... « Des choses inconnues du grand public apparaissent, mais il reste tellement à apprendre », estime-t-il en citant des exemples de l'après cessez-le-feu : politique de la terre brûlée de l'OAS, massacre des harkis...

« Torture institutionnalisée »

Pacifiste convaincu, ce Granvillais, alors jeune instituteur en Seine-Maritime, s'était préparé au départ en Algérie en lisant La Question d'Henri Alleg et les journaux (Témoignage chrétien, L'Humanité, France Observateur) qui tentaient de rendre compte de la réalité du terrain, malgré la censure.

Les autres appelés, ceux qui n'avaient pas eu accès aux informations non-censurées en Métropole, étaient « préparés de manière manichéenne pendant les 4 mois de classe : les Arabes, s'ils n'étaient pas des fellagas en puissance, les aidaient, tandis que nous étions les protecteurs des civils ».Sur la table du salon, Jean-Pierre Crépin a ressorti les photos d'époque, les vieilles cartes postales, les lettres du front précieusement conservées par sa mère, et un écusson du commando de chasse auquel il avait été affecté. Après quatre mois de classe en Kabylie, à Dellys, son pacifisme affiché et son refus d'enseigner dans les écoles d'officier de réserve lui valent d'être placé dans un de ces groupes chargés de traquer les rebelles fellagas.

Installé dans une zone interdite du massif de l'Ouarsenis, à 150 km au sud d'Alger, vidée de toute population afin d'affaiblir les rebelles, le jeune appelé est aidé de harkis. « La majorité faisait ça par nécessité. Dans le bled, c'était la misère, entre les rançons versées aux fellagas et l'instauration des zones interdite. D'autres ne pouvaient pas rentrer chez eux parce qu'ils avaient donné des renseignements sous la torture ».

Les rafles et la torture sur les civils, pratiques « institutionnalisées et justifiées ». Avant son arrivée dans la zone interdite, Jean-Pierre Crépin se rappelle d'un jour de marché où tous les hommes avaient été raflés. Il n'a pas assisté à leur torture mais se souvient des hurlements dans un hangar. « Le sergent avait arrêté pour aller à la messe, je suis entré, j'ai vu l'homme qui était « travaillé », je suis allé prévenir l'aumônier mais il n'a rien fait. »

Lui-même estime que « sans avoir participé, on se sent coupable d'avoir été présent et de ne rien avoir pu faire ».

Mélanie CONTENT

 

 

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