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Albert Nallet est un ancien soldat du contingent français qui a servi durant 27 mois en Algérie.

Il a été confronté à la peur de mourir, mais aussi de donner la mort. Il fut de ceux qui ont osé briser le silence. Il est l’auteur du livre "On n’efface pas la vérité." Interview…

Reporters : Albert Nallet, vous qui avez servi en Algérie au cours d’une période particulièrement difficile et dans l’une des zones les plus dangereuses pour l’armée française, quelle est, 55 ans plus tard, votre vision des choses et que répondez-vous à ceux qui déclarent que, dès 1958, l’ALN avait perdu l’initiative ?
Albert Nallet : 1958 a été l’année des actions les plus importantes et les plus fortes de l’ALN. Par exemple, en Kabylie, où j’étais stationné avec une compagnie, on s’était retranchés et on a résisté pendant deux jours. Les Algériens ont même abattu trois avions. Ce combat avait coûté la vie à six soldats français. Ce n’est qu’à la fin de 1959 que l’ALN a été affaiblie, mais elle a changé de tactique, il n’y a plus eu d’engagement de compagnies entières, elle a privilégié les petits groupes.

A votre retour en France, comment a été votre rapport avec les Français et de manière générale avec tous les anciens combattants d’Algérie ?
On en parlait très difficilement, et même maintenant la parole ne se libère pas vraiment. En revanche, ce sont les jeunes générations qui posent des questions et cherchent à comprendre. Mais il faut aussi savoir qu’à l’époque, le peuple français était traumatisé, dans le désarroi, il faut se rendre compte de l’horreur que cela a représenté. On a commencé la guerre en 1954, mais ce n’est qu’en 1956, quand la gauche est arrivée au pouvoir, que Guy Mollet, a de manière claire, déclaré cette guerre imbécile et sans issue, et en même temps, il commençait à négocier pour finir par capituler. Puis De Gaulle arrive avec le slogan « Algérie française », il mène une guerre plus longue et plus dure que ses prédécesseurs, pour finir par déclarer que les Algériens ont le droit à l’autodétermination.

Avec ce contexte d’indécision politique, la guerre aurait pu durer bien plus longtemps… A votre avis, quels éléments ont malgré tout donné naissance aux accords d’Evian ?
C’est une convergence de lutte des combattants algériens et du peuple français qui a, d’une certaine manière, obligé le gouvernement à en finir. Il y a aussi le soutien international au combat des Algériens, la France avait quand même été condamnée par l’ONU. Bien sûr, il y a aussi les considérations politiques et économiques, en premier lieu le pétrole ou les accords sur les essais nucléaires. Mais ce qui est sûr, c’est qu’il y a eu une évolution chez le peuple français. Au début de la guerre, il n’était pas du tout convaincu par l’idée de l’indépendance du peuple algérien, on avait formé les Français de cette manière.

A l’heure actuelle, quelle est la place de la guerre d’Algérie dans la conscience collective française ?
Les choses ont beaucoup évolué, notamment depuis l’année dernière. La guerre d’Algérie est maintenant incluse dans le programme d’histoire, alors qu’auparavant on ne parlait que de décolonisation. C’est dans ce contexte qu’avec Djoudi Attoumi et Abdelmadjid Azzi on organise des rencontres dans les lycées. Cette initiative ne se fait pas dans le cadre d’une démarche officielle, mais en France, vu que la guerre d’Algérie est maintenant au programme, les professeurs d’histoire sont libres d’inviter qui ils souhaitent pour compléter leurs cours. Et le fait de voir d’anciens combattants des deux camps réunis suscite davantage d’intérêt de la part des étudiants, c’est de cette manière que l’amitié peut se construire.

Au sujet de l’enseignement, qu’attendez-vous des autorités françaises ?
Ce que l’on réclame, c’est que l’éducation nationale offre les moyens nécessaires pour ce travail de mémoire. C’est une revendication de la Fédération nationale des anciens combattants d’Algérie (FNACA), vu qu’à l’heure actuelle, c’est surtout du bénévolat de notre part. Au cours de nos rencontres avec les lycéens, on arrive toujours à la conclusion que la France doit signer le traité d’amitié et arriver à condamner la torture qui a été faite en son nom, et que cette guerre n’a été que pour maintenir le système colonial qui n’avait plus lieu d’être. Et je pence que le président Hollande, contrairement à son prédécesseur, a fait, lors de sa dernière visite en Algérie, un pas dans ce sens, en parlant du caractère affreux de la torture et de la colonisation.

 



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