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bandeau  Attendre 2014 pour quitter l’Afghanistan ne sert à rien !

(A VOIR UN COMPLEMENT A LA FIN DE CET ARTICLE DE NOS AMIS)

Le mercredi 10 août 2011, par Webmestre

Après les débats houleux à propos du 14 juillet et la mort d’un commando marine, tombé le même jour en Afghanistan, le contre-amiral Prazuck a cru devoir, le 21 juillet, nous donner une leçon de citoyenneté dans une tribune du journal Le Monde intitulée « L’armée, la démocratie et le sacrifice d’un soldat ». Nous devrions dissocier les objectifs politiques de l’engagement militaire. Une façon pour l’armée d’échapper à des responsabilités que la recherche historique finit toujours par lui imputer.

Le texte de l’amiral (disponible ICI) peut se résumer ainsi. Notre présence militaire en Afghanistan est le résultat d’une décision politique issue d’un débat démocratique. Un soldat ne discute pas les raisons de sa mission. Il reste « fidèle » à son pays. Donc, s’il tombe, il est mort pour la France. Parler de sacrifice inutile est « insupportable ».

Une conception différente de l’honneur.

Ce qui est insupportable, amiral, c’est ce sempiternel couplet des « morts pour la France » au champ d’honneur, appliqué indifféremment quelque soit le conflit, défense du territoire national, aide à des populations opprimées…ou intervention néo-coloniale.

Ce couplet, on nous l’a servi lorsque nos camarades tombaient en Algérie victimes de la démission et de la tromperie de politiques qui avaient lâché la bride à des responsables militaires jusqu’au-boutistes. Des militaires dont « l’honneur » consistait surtout à tenter de redorer leur blason en faisant oublier une précédente défaite. Et, pour ce faire, à ne pas s’embarrasser des moyens employés, y compris contre la population civile.

Durant ce triste épisode, où l’engagement militaire appliqua avec un zêle aveugle des objectifs politiques absurdes, l’honneur de l’armée n’appartint qu’aux rares responsables qui refusèrent une répression cruelle. Comme le général de Bollardière, couvert de décorations gagnées contre l’occupant allemand, mais condamnant sans réserves l’usage de la torture. Et pourtant cette guerre prétendait s’appuyer, pour reprendre vos propos, sur un débat et une décision démocratique.

Rappelons qu’à l’époque les politiques avaient d’abord été élus pour faire la paix puis avaient trahi leurs promesses. Comme le président actuel qui prônait le départ d’Afghanistan…dans son programme électoral.

Une grande muette… à sens unique !.

Le rapport armée/politique en France n’est pas celui observé par exemple en Allemagne ou aux États-Unis ou les responsables militaires n’attendent pas la fin des conflits ou leur retraite pour exprimer leurs désaccords.

En France nous avons une prétendue grande muette qui se retranche d’abord derrière le politique, au moment de l’action, puis s’ingénie ensuite à masquer tout ce qu’elle a fait de déshonorant. En faisant censurer si besoin, et même longtemps après les conflits, les révélations qui la contredisent. Ou en proclamant les pires contre-vérités comme ce manifeste caricatural des 521 officiers généraux ( que nous avons déjà cité). Ils y racontent, quarante ans après, une histoire de la guerre d’Algérie contredite par le vécu de dizaines de milliers d’appelés, qu’ils aient été pour ou contre cette guerre.

Une attitude qui ne nous étonne plus, après de nombreux précédents. Ainsi il fallait occulter les milliers de soldats sacrifiés sans raison durant la guerre 14/18 par des chefs incapables, les fusillés pour l’exemple durant cette même guerre, le massacre du 8 mai 1945 en Algérie ou les 89.000 morts de Madagascar en 1947. La « grande muette » veut d’abord faire taire ceux qui dénoncent ses forfaits !

Vous êtes donc malvenu, amiral, pour donner des leçons à ceux qui, avec la majorité des Français, dénoncent l’inutilité de la guerre en ’Afghanistan. Votre « honneur » serait de de dire la vérité aux politiques. Comme le chef d’État-major de la Marine s’inquiétant récemment de l’usage prolongé du porte-avions Charles de Gaulle en Lybie. Un courage inhabituel de la part d’un officier général !

Abandonnez donc votre langue de bois

Abandonnez cette langue de bois, auxiliaire de la propagande et qui perdure depuis longtemps. Comme le montre ce parallèle significatif fait dans l’émission « Arrêt sur image » entre guerre d’Algérie et guerre d’Afghanistan et dont nous donnons ci-dessous un extrait. Une émission salutaire, rentrant dans la série « La guerre en face », et qui a donné la parole à Hervé Ghesquière, un des otages rentré d’Afghanistan. On se souvient de la désinformation de l’armée au moment de la prise d’otages. Aujourd’hui Hervé Guesquière veut oublier cette indélicatesse. Mais il rappelle que lorsqu’il était reporter « embedded » de l’armée française (c’est à dire accompagnant l’armée) l’appréciation des officiers vis à vis de la guerre était différente suivant que la caméra tournait ou pas…

Si ceux qui sont le mieux à même de nous informer de la réalité du terrain masquent la vérité, ne préparent-ils pas indirectement les conditions des prochains décès « inutiles » de cette guerre ? En attendant, pour les aider à réfléchir, qu’ils prennent connaissance de cette opinion d’un ancien rappelé d’Algérie publiée dans Le Monde du 27 juillet 2011 :

C’est avec beaucoup d’aplomb que notre président de la République a récemment déclaré « qu’il faut savoir finir une guerre », alors qu’il aurait dû se reprocher de n’avoir pas su éviter de la commencer. Se lancer dans l’aventure afghane sans but bien défini, sans pouvoir prouver qu’elle répond aux intérêts vitaux de la nation, sans débat parlementaire préalable et sans mettre en œuvre les moyens nécessaires à sa réussite, était une erreur qu’ont payée de leur vie les soldats dont nous saluons aujourd’hui le sacrifice. Au cours de mon existence, j’ai vécu deux guerres coloniales, et même participé contre mon gré à l’une d’elles. Chaque fois, j’ai pu mesurer l’inanité des arguments avancés pour justifier les engagements, arguments qu’on nous ressort aujourd’hui : la pacification d’un pays, l’extermination des terroristes, la formation d’une armée autochtone…

Les milliers de soldats français qui ont été tués en Indochine et en Algérie n’ont pas empêché le Vietminh et le FLN de triompher, tout comme nos morts d’Afghanistan n’empêcheront, probablement, pas les talibans de prendre le pouvoir. Et encore pouvait-on trouver une légitimité initiale dans les guerres d’Indochine et d’Algérie, pays où vivaient à l’époque un nombre important de nos compatriotes. Rien de cela en Afghanistan.

Alors, nos soldats sont-ils morts pour rien ? Pas tout à fait si leur sacrifice peut faire prendre conscience à une majorité de nos citoyens que la participation à une guerre comme celle de l’Afghanistan résulte d’un aveuglement dramatique et qu’il faut y mettre fin très rapidement, sans attendre l’échéance fixée à 2014.

René Cottin, Pau

© Le Monde


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En complément à cet article nous ajoutons des vidéos de l'émission

"Arrêt sur images" 

Afghanistan-Algérie : deux guerres, un seul discours médiatique

Quand les images de 2008 ressemblent à celles de... 1959

CLIQUEZ SUR LE LIEN CI-DESSOUS :

http://www.arretsurimages.net/contenu.php?id=1110 

 

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