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guerresansnom

 

Avec de longs passages du film de Bertrand Tavernier et Patrick Rotman : « LA GUERRE SANS NOM » vous allez pouvoir entendre plus de 40 témoignages d’appelés de la guerre d’Algérie en 11 épisodes.

Loin de nous ériger en conscience pure ou en tribunal qui distribuerait avec la facilité que donne le recul du temps, les bons et mauvais points, nous souhaitons écouter ceux qui n'ont jamais parlé, les appelés de la guerre d'Algérie.

L'histoire se raconte toujours par en haut, à la manière d'une épopée où se distinguent les grands hommes, les généraux à épaulettes, les héros. Comme ironisait Brecht en parlant de la conquête de la Gaule de Jules César, n'avait-il pas au moins un cuisinier avec lui.

Nous voulons donc faire revivre la guerre d'Algérie par ceux qui l'ont faite, les soldats du contingent, ces 2,7 millions de jeunes Français qui ont franchi la Méditerranée entre 1954 et 1962.

Nous avons choisi la région de Grenoble afin de donner une unité aux témoignages recueillis.

La manifestation qui s'est déroulée dans cette ville en mai 1956, contre le départ des rappelés, nous fournissait un point de départ.

Là se croisaient les destinés d'un certain nombre de nos témoins qui, dans les mois et les années suivantes, ont servi en Algérie.

Nous avons été frappés par la densité et la force des témoignages recueillis. Comme si les mémoires avaient été congelées et s'ouvraient enfin au questionnement, avec la certitude que le temps était venu de chasser l'amnésie collective.

Plus de quarante témoins ont été interrogés ; certains étaient présents le 1ernovembre 1954, d'autres, en juillet 1962, ont vu l'ALN entrer dans Alger.

Les uns ont servi dans les paras, les commandos ou les chasseurs, d'autres dans le Génie sur les barrages électrifiés. Quelques-uns étaient isolés sur des pitons, d'autres sans cesse en opération.

Beaucoup ont connu les horreurs de la guerre, d'autres n'ont aperçu les maquisards du FLN que de loin. Quelques-uns ont tout fait, certains n'ont rien vu. Les uns ont pris goût à la guerre, elle les a révélés à eux-mêmes, d'autres l'ont difficilement supportée.

Des gaullistes, des chrétiens, des communistes, des sans-parti, ouvriers, paysans, instituteurs, des "bouffeurs de fell's" et des consciences "torturées", toutes les opinions se confrontent, s'affrontent ou se confortent.

Les témoins abordent tous les thèmes : la vie quotidienne, la bouffe, la peur, la solitude, les opérations, les interrogatoires, les exactions du FLN et la torture, l'abandon des harkis, les prisonniers et les blessures, le putsch de l'OAS.

Ainsi peu à peu, ces voix multiples se complètent et composent l'immense puzzle des appelés.

Tel est le matériel de base original, exceptionnel - une cinquantaine d'heures - à partir duquel nous avons construit le film. Une longue durée. Nous avons eu souvent l'impression, alors que nous tournions, de procéder à une sorte de psychanalyse sauvage. En se racontant, les témoins cherchaient au fond d'eux-mêmes une vérité longtemps enfouie.

Combien de fois nous ont-ils avoué parler de ces événements pour la première fois ? Même à leurs enfants, beaucoup d'entre eux ne s'étaient jamais confiés. C'est dire que cette introspection devant la caméra fut douloureuse, lente, souvent hachée de silence et de larmes.

La forme du film respecte ce cheminement.

Nous avons voulu retracer les itinéraires d'individus de vingt ans lâchés dans la guerre. Afin que ces trajectoires singulières touchent à l'imaginaire collectif, à l'universel, nous les avons regardées à l'intérieur.''

Enfin, nous avons voulu des vies dans la guerre, pas des discours sur la guerre.

Bertrand TAVERNIER 

 

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